Par une décision du 28 janvier 2022 (Cons. Const., 28 janvier 2022, n° 2021-965 QPC, Société Novaxia développement et autres), le Conseil constitutionnel a déclaré non conformes à la Constitution « les dispositions du f du paragraphe II de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, qui permettent de poursuivre les refus opposés aux demandes des enquêteurs et contrôleurs de l’Autorité des marchés financiers ».
Pour rappel, le f du paragraphe II de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier prévoit que l’Autorité des marchés financiers peut prononcer une sanction à l’encontre de : « Toute personne qui, dans le cadre d’une enquête ou d’un contrôle effectués en application du I de l’article L. 621-9, sur demande des enquêteurs ou des contrôleurs et sous réserve de la préservation d’un secret légalement protégé et opposable à l’Autorité des marchés financiers, refuse de donner accès à un document, quel qu’en soit le support, et d’en fournir une copie, refuse de communiquer des informations ou de répondre à une convocation, ou refuse de donner accès à des locaux professionnels ».
Les Sages de la rue de Montpensier ont jugé que ces dispositions méconnaissent le principe de nécessité des délits et des peines qui découlent de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 aux termes duquel : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ».
Après avoir rappelé que le principe de nécessité des délits et des peines implique « qu’une même personne ne peut faire l’objet de plusieurs poursuites tendant à réprimer de mêmes faits qualifiés de manière identique, par des sanctions de même nature, aux fins de protéger les mêmes intérêts sociaux. Si l’éventualité que deux procédures soient engagées peut conduire à un cumul de sanctions, le principe de proportionnalité implique qu’en tout état de cause le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues. », le Conseil constitutionnel a jugé que « la répression administrative du manquement d’entrave aux enquêtes et contrôles de l’Autorité des marchés financiers prévue par les dispositions contestées du f du paragraphe II de l’article L. 621-15 et la répression pénale organisée par l’article L. 642-2 du code monétaire et financier tendent à réprimer de mêmes faits qualifiés de manière identique, par des sanctions de même nature, aux fins de protéger les mêmes intérêts sociaux. ».
En faisant, en quelque sorte, « doublon » avec l’article L.643-2 du code monétaire et financier, lequel prévoit qu’« Est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300 000 euros le fait, pour toute personne, de mettre obstacle à une mission de contrôle ou d’enquête de l’Autorité des marchés financiers effectuée dans les conditions prévues aux articles L. 621-9 à L. 621-9-2 ou de lui communiquer des renseignements inexacts. », les dispositions du f du paragraphe II de l’article L.621-15 du même code sont contraires au principe de nécessité des délits et des peines.
Concernant l’application dans le temps de cette déclaration d’inconstitutionnalité, celle-ci « peut être invoquée dans les procédures en cours par la personne poursuivie en application des dispositions déclarées contraires à la Constitution lorsqu’elle a préalablement fait l’objet de poursuites sur le fondement de l’article L. 642-2 du code monétaire et financier. ».
Pour lire la décision : Décision n° 2021-965 QPC du 28 janvier 2022 | Conseil constitutionnel (conseil-constitutionnel.fr)